lundi 27 octobre 2014

48. ANNE DELBEE : Une femme



Ce livre retrace la vie tumultueuse et tragique
de Camille Claudel,
la soeur du célèbre écrivain.

A la fin du dix-neuvième siècle,
se lancer dans une carrière de sculpteur
 est inconcevable, voire scandaleux.
Mais la jeune fille se lance à corps perdu dans l'aventure...
En 1883, elle rencontre Auguste Rodin
qui accepte de la prendre comme élève.
Suivent quinze années d'une liaison passionnée et orageuse
d'où Camille sortira épuisée, vaincue...

Malgré un immense talent et une oeuvre considérable,
elle ne parviendra pas à sortir de l'ombre du "Maître"
et sombrera dans la folie...
Sa mère, qui l'a toujours détestée,
finira par la faire interner à l'asile de Montdevergues.
Elle y mourra trente ans plus tard...
.
Un livre magnifique et poignant...
passionnant d'un bout à l'autre.

A lire absolument pour comprendre
à quel point il est difficile, quand on est femme,
d'être reconnue pour son talent créateur...





 

48. CITATIONS CHOISIES

"Instruite par un tel maître,
 vivant dans l'intellectuelle intimité d'un tel frère,
 il n'est point étonnant que Mlle Camille Claudel qui est bien de sa famille,
 nous apporte des oeuvres qui dépassent par l'invention
et la puissance d'exécution tout ce qu'on peut attendre d'une femme.

L'année dernière, elle exposait le buste de Rodin :
 une merveille d'interprétation puissante, de libre verve, de grande allure.
 Cette année, elle montre deux compositions étranges, passionnantes,
 si neuves d'invention, si émouvantes dans leur arrangement décoratif,
 d'une poésie si profonde et d'une pensée si mâle, 
que l'on s'arrête surpris par cette beauté d'art qui nous vient d'une femme : 
j'aime à me répéter à moi-même cet étonnement.

"La valse et Clotho, ainsi se nomment ces oeuvres...
Mlle Claudel s'est hardiment attaquée
 à ce qui est peut-être le plus difficile à rendre par la statuaire : 
un mouvement de danse. 
Pour que cela ne devienne pas grossier,
 pour que cela ne reste pas figé dans la pierre, il faut un art infini, 
Mlle Claudel a possédé cet art..."

Elle lit avidement la description qu'il fait des deux statues.
 Il a compris, il a vu.

"Enlacés l'un à l'autre. Mais où vont-ils,
 éperdus dans l'ivresse de leur âme et de leur chair
si étroitement jointes ?
 Est-ce à l'amour, est-ce à la mort ?
 Les chairs sont jeunes, elles palpitent de vie, 
mais la draperie qui les entoure, qui les suit, 
qui tournoie avec eux bat comme un suaire. 
Je ne sais pas où ils vont, si c'est à l'amour, si c'est à la mort,
 mais ce que je sais,
c'est que se lève de ce groupe une tristesse poignante,
 si poignante qu'elle ne peut venir que de la mort,
 ou peut-être de l'amour plus triste encore que la mort.
"Qui sait ? Un peu de son âme, un peu de son coeur
 l'ont miraculeusement inspirée..."

Il la regarde, un peu de joie s'est répandue sur ce visage tragique.

"Mlle Claudel, une des plus intéressantes artistes de ce temps. 
Auguste Rodin peut être fier de son élève, l'auteur de Tête d'or de sa soeur.
Mlle Claudel est bien de la race de l'un et de la famille de l'autre."

Elle le remercie mais il sent quelque chose de forcé. 
Elle a les larmes aux yeux.
L'aurait-il froissée ?

"Vous savez, ce n'est pas par amitié.
 Geffroy est de mon avis, Lucien Bourdeau aussi. 
Hier encore, nous en parlions."

Comment lui expliquer qu'elle en a assez 
d'être l'élève de l'un et la soeur de l'autre ?
L'étau...
D'ailleurs ni l'un ni l'autre ne sont là.
 Elle est sculpteur, c'est tout.
 Camille Claudel.
Sculpteur. 
Une femme.
 Point.
.
.

mercredi 8 octobre 2014

47. EUGEN DREWERMANN : Le testament d'un hérétique

Titre original :
"Der Spiegel des Unendlichen"
("Le miroir de l'infini")


Eugen Drewermann, dans ce livre,
reconstitue l'histoire d'un homme
qui est devenu un symbole de la liberté spirituelle.

Pour avoir compris très tôt le radical bouleversement de la pensée
qu'impliquaient les découvertes de Copernic,
pour être allé encore plus loin en imaginant
un univers infini et une pluralité de mondes,
et surtout pour avoir défendu envers et contre tous
sa liberté de conscience, 
Giordano Bruno fut victime
des tortionnaires de l'Inquisition,
condamné au bûcher et  brûlé vif
le 17 février 1600 à Rome.

L'auteur nous livre ici
les confessions imaginaires de cet hérétique génial
et nous fait vivre ses dernières semaines de prison.

A travers ces mémoires apocryphes, 
il nous fait plonger dans les grandes controverses du XVIe siècle
 - où se joue tout l'avenir de la pensée occidentale -
 dans l'horreur des procès d'Inquisition 
et dans l'univers visionnaire d'un homme hors du commun. 

Un livre passionnant, intelligent, émouvant, vivant et,
c'est ce qui est le plus étonnant,
d'une incroyable "modernité"...
.


47. CITATIONS CHOISIES

" Je crois en un univers infini,
 Création de la toute-puissance infinie,
 car il serait indigne de la bonté et de la puissance divines,
si elle peut créer une pluralité de mondes,
qu'elle n'ait créé qu'un monde fini.

C'est pourquoi j'ai toujours affirmé qu'il existe
une pluralité d'autres mondes semblables à cette terre,
que je tiens avec Pythagore pour une étoile,
au même titre que les innombrables autres planètes et astres.
Cette pluralité de mondes forme un tout infini dans l'espace infini,
 qui se nomme lui-même l'univers infini,
de sorte qu'on doit supposer une double infinité,
selon la grandeur de l'univers et selon le nombre des corps célestes."

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"La révélation ?
Dieu n'a nullement besoin de vous pour parler aux hommes.
Quand il veut parler aux fleurs, il fait briller le soleil ;
quand il veut parler aux nuages, il fait souffler les vents.

Dieu s'adresse à chaque chose dans son propre langage.
Tout ce qui est propre à l'essence d'un être humain, d'une fleur,
d'un ver de terre ou d'un nuage parle du Dieu qui les a créés.

Dieu s'exprime en poussant toute chose
vers la forme la plus intense de son existence.

Comprenez-moi bien, Dieu ne s'est jamais révélé :
 il se révèle partout et toujours ; 
l'ensemble de sa Création est son unique révélation,
 qui demeure de toute éternité, comme l'Eternel lui-même.

Mais tout ce qui empêche l'être humain
ou n'importe quel autre élément de la Création,
de vivre selon son essence, obscurcit la révélation divine..."
.

Dieu agit toujours de l'intérieur.
(...)
Lorsque Dieu agit, c'est lui-même qu'il modèle,
puisqu'il est l'âme de toute chose.
Vous ne pouvez dicter à une rose comment elle doit fleurir;
elle le sait de l'intérieur ;
le vent et la pluie sont les seules conditions
de la beauté de son développement,
vous n'avez pas besoin de lui dire ce qu'elle doit faire.
(...)
Pourquoi donc prétendez-vous ordonner de l'extérieur la vie humaine,
et tout ce qui se trouve sur la terre et dans le ciel ?
.

Chacun d'entre nous doit vivre le destin
pour lequel il a été créé,
il doit suivre la loi de son être,
celle qui est au creux de lui tel un démon ou une fée,
et qui guide tous ses pas.

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Eugen Drewermann

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